Stalag XVIIIA – témoignages

 

Tout ceci a été rendu possible grâce principalement a deux personnes de CSF que nous tenons tout particulièrement à remercier : Chantal qui nous a aidé et guidé au début de nos recherches puis qui nous a mis en contact avec Franziska et Franziska qui par son action, ses recherches et ses courriers auprès de la mairie de St Paul a été la clé qui nous a permis de retrouver Hilda et sa famille. Nous les en remercions chaleureusement.

Et pour finir, une photo de la ferme dans laquelle notre père a vécu toute la fin de sa captivité. Cette ferme a été abandonnée très peu de temps après la fin de la guerre est aujourd’hui à l’abandon.

Mesdames, Messieurs,
Par ce courrier nous tenons à vous informer de l’état de nos recherches sur le parcours de notre père Pierre Thébaud pour la période du 20 octobre 1942 jusqu’à sa libération en mai 1945 alors qu’il était prisonnier en Autriche, stalag XVIIIA de Wolfsberg. Nous n’avons pas encore réalisé de recherches approfondies sur la période de sa capture de Juin 1940 à octobre 1942.
Le but de notre recherche initiale était de tenter de retrouver un enfant que notre père aurait eu avec une jeune Autrichienne, Hilda, à la fin de sa captivité lorsqu’il travaillait dans une ferme. Votre aide nous a été déterminante, nous vous en remercions.

Les raisons de cette recherche :
Jusqu’à peu de temps avant le décès de notre mère, nous ignorons tout ou presque de cette période de la vie de notre père. Il ne nous en parlait que très peu, nous ne posions pas de questions…
Quelques mois avant son décès, (notre père étant décédé depuis quelques années) notre mère, dans le fil d’une discussion nous a annoncé que nous avions probablement un frère ou une sœur vivant en Autriche… Nous avons été surpris mais considérant que le sujet pouvait être douloureux pour maman nous ne lui avons pas posé plus de questions…
Après le décès de notre mère et une période de réflexion, nous avons décidé d’en savoir plus et avons alors questionné un neveu de notre père toujours en vie. Jeunes, ils étaient très proches étant donné un différentiel d’âge peu important. Ce neveu de notre père a été très surpris de nos questions. Il nous a confirmé ce que notre mère nous avait dit, en nous précisant qu’il était persuadé que nous étions au courant… Il nous a également confirmé qu’à son retour en France, Pierre n’avait qu’une seule idée en tête : retourner en Autriche retrouver Hilda qu’il avait laissée enceinte. Il en a été empêché par des parents qui ne voulaient pas en entendre parler. Une nièce de notre père, également interrogée, nous a confirmé tout ce que nous venions d’apprendre… Par la suite, nous avons découvert qu’une sœur de notre mère était également au courant de cette paternité probable en Autriche…

  • Historique de notre recherche.
    Nous avons alors rassemblé tous les documents que Pierre avait ramenés de captivité. Il s’agit principalement de quelques photos (négatifs et positifs), de notes manuscrites sur quelques pages de carnets (beaucoup de pages probablement perdues), de lettres adressées par Pierre à ses parents couvrant la période de janvier 43 à mai 45, de trois carnets de chants d’un camarade prisonnier avec lui, d’un laissez-passer, et de son carnet militaire.
    Sans rentrer dans les détails de notre recherche nous avons pu assez rapidement identifier la région dans laquelle Pierre se trouvait lorsqu’il dépendait du Stalag XVIIIA ainsi que des différentes zones dans lesquelles pouvaient se situer la ferme que nous recherchions. Nous nous sommes alors polarisés sur la recherche de la dernière ferme dans laquelle il vivait (avant la libération) pour tenter de retrouver Hilda.
    Nous avons également consulté les archives (en Français) militaires de Caen, mais celles-ci sont principalement en langue Allemande. Elles ne nous ont pas été utiles.
    Son laissez-passer daté du 1er aout 1944 nous donne le nom de la commune où se trouvait son commando ainsi que le numéro de celui-ci : Legerbuch, commando 10.333 L. Eu égard au fait que son laissez-passer lui donnait une totale liberté de circulation dans la zone du Stalag de Wolfsberg, mais aussi d’une remarque dans l’un de ses courriers, nous pensons que Pierre était « l’homme de confiance » de son commando.
    En arrière-plan de deux des photos un clocher au sommet d’une colline apparaît clairement. Une recherche sur Google Earth et sur des cartes Autrichiennes dans la région de Legerbuch nous permet de l’identifier avec une très forte probabilité comme étant celui de l’église de Josefiberg à St.Paul im Lavanttal , à côté de Loschenthal .
    A partir du peu d’information que Pierre nous donne dans ses courriers, sur ses trajets entre la ferme et le stalag, nous pouvons également identifier St Paul comme étant la gare où il se rend pour prendre le train afin d’ aller régulièrement au stalag de Wolfsberg. Il indique que la ferme se trouve en montagne à 5 kms de la gare par un chemin difficile en hiver.
    Après son hospitalisation à Wolfsberg, il indique sur une note manuscrite : Reparti au travail le 20 octobre 1942 à Legerbuch chez Klingbacher. Puis : Changé de maison le 8 février (1943) pour aller travailler chez Tirola. Il y restera jusqu’à sa libération en mai 1945.
    Les courriers que nous possédons couvrent une partie de cette période, de janvier 43 à mai 45.
    Sur l’un des trois carnets de chants qu’il a ramené, il est noté : Relié chez Spernich le 8 mai 1944. Même commando, Legerbuch.

Nous avons donc cinq lieux identifiés :
• Église de Josefiberg à St.Paul im Lavanttal , à côté de Loschenthal.
• Legerbuch sur son laissez-passer.
• Legerbuch chez Klingbacher
• Tirola
• Spernich
S’il a été facile de trouver Legerbuch sur les cartes, il a été plus difficile pour Spernich et Tirola. Toutefois après de nombreuses recherches, sur les cartes Autrichiennes via Internet, nous trouvons deux lieux-dit : Spernich et Troller. Franziska nous indique que le mot Troller, prononcé par un Autrichien de la région est entendu par une oreille Francophone comme ‘’Tirola’ et c’est bien ce que Pierre a orthographié…
Nous avons communiqué toutes ces informations à CSF, particulièrement à Franziska. A partir de ces données, elle a rédigé un document résumant notre recherche et l’a envoyé la mairie de St Paul qui l’a transmis à Mme Elvira Klinbacher habitant à St Paul. Elvira a reconnu les fermiers et Hilda sur une des photos que nous avions communiquées. Connaissant la famille d’Hilda, elle a donné ce courrier à l’un des fils de Hilda habitant St Paul ; qui à son tour l’a transmis à Annemarie, une de ses sœurs, second enfant de Hilda.
A partir de ce moment il était clair que nous avions retrouvé Hilda. Malheureusement elle était décédée en février 2015. Aucun de ses enfants n’imaginait que Pierre et Hilda avaient pu nouer une relation en 1944-1945. Pour eux il était certain que leur mère n’avait pas eu d’enfant avant de se marier. Sur les conseils de Franziska, nous avons alors accepté de ne pas aller plus loin dans nos recherches, afin de ne pas davantage perturber la vie de cette famille.
C’est alors, après quelques échanges téléphoniques entre Franziska et Annemarie Menner (seconde fille de Hilda), qu’Annemarie a souhaité échanger directement avec nous. Nous avons alors commencé à correspondre directement par mails en Anglais, accompagnés très souvent de photos. Ces échanges perdurent à ce jour.
Annemarie a beaucoup évoqué la vie de sa mère, elle savait que celle-ci, habitant St Paul, travaillait dans une ferme ‘des environs’ pendant la guerre. Elle a beaucoup regretté de ne plus pouvoir échanger avec elle de cette période : elle nous aurait dit la vérité. Elle considère que Hilda, dans une région comme St Paul n’aurait pas été en mesure de cacher une grossesse ni d’avorter, ce qui n’était pas possible à cette époque dans une région profondément catholique. Afin de lever définitivement cette possibilité de naissance, Annemarie a consulté les registres d’état civil de St Paul. La réponse est sans équivoque, Hilda n’a pas eu d’enfant avant son mariage.
Nous ne saurons donc jamais pourquoi notre père voulait retourner en Autriche pour retrouver Hilda qui était enceinte, selon lui. Il n’avait quitté l’Autriche que sous la contrainte physique de ses camarades.
Avec Annemarie nous avons continué les échanges qui sont devenus plus personnels et que nous n’évoquerons pas ici.
Annemarie a retrouvé la ferme Tirola (Troller), a rencontré des personnes ayant connu les fermiers pour lesquels Pierre et Hilda travaillaient. Elle nous a communiqué le nom des fermiers ainsi que le prénom d’une petite fille apparaissant sur plusieurs photos et avec laquelle Pierre jouait : Marie. Personne ne sait ce qu’elle est devenue…
En Juin 2016, Annemarie est retournée dans la maison de ses parents aider une de ses sœurs à classer les papiers de leur mère. Elle y a retrouvé 3 photos, dont 2 que nous ne connaissions pas. Notre plus grande surprise a été que Hilda possédait la photo sur laquelle on la voit ainsi que la famille des fermiers, la petite Marie et Pierre… Au dos de cette photo une inscription : Zur Erinnerung (En souvenir) 24 sept 1943…
Fin juillet 2016. Patrick (mon frère) et Françoise (son épouse), partant en vacances vers la Roumanie, décident de faire un détour pour passer par Wolfsberg / St Paul. Ils y rencontrent Annemarie qui leur fait visiter la région et en particulier la ferme ou Pierre et Hilda ont partagés un moment de vie.
Actuellement nous (Yves, Patrick et Marie-Hélène avec nos conjoints) envisageons un voyage au printemps prochain en Carinthie pour visiter l’ensemble des lieux (ceux nous avons pu identifier et non seulement St Paul) où notre père a vécu en Autriche pendant une partie de sa captivité.

 

Document rédigé en décembre 2016, finalisé en janvier 2017

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